top of page

Baptême du feu

Dimanche dernier, je vous racontais qu’on était en pleine fire season à Cape Town. Le sort aura voulu que mon article de dimanche soit prolongé d’un épilogue dès le lendemain : lundi soir, c’est la montagne juste au-dessus de ma rue qui s’est embrasée. Le feu a fini à 200m de chez moi.


Récit d’une nuit surréaliste et pour le moins marquante.

Lundi après-midi, un incendie se déclenche sur le bas de la Table Mountain, à 2km de chez moi. (J’habite au niveau des dernières maisons à flanc de la montagne avant le bush). L’incendie est maîtrisé, la surface ayant brûlé n’est pas bien grande: quelques centaines de mètres carrés. Mais vers 21h30, la montagne s’enflamme à nouveau, quelques dizaines de mètres plus à gauche. Cette fois, la situation devient très vite hors de contrôle : le vent souffle à plus de 70km/h et attise les flammes à toute vitesse : la montagne s’embrase. A ce moment-là, je suis tranquillement dans ma chambre.


Vers 22h30, ma colloc débarque dans ma chambre en disant ‘’tu ferais mieux de venir voir ça!’’. ‘’Ça’’ ce sont des flammes géantes que l’on voit danser derrière les tours à 200m en face de chez nous, depuis la fenêtre du salon. Wow. Sur le Whatsapp du quartier, les messages déferlent: on suit minute par minute l’évolution de la situation, le déploiement de plus d’une centaine de pompiers, l’évacuation progressive des rues les plus proches de la ligne du feu, la mobilisation des habitants du quartier pour aider les forces de l’ordre à gérer la situation. Sur les réseaux sociaux, les photos affluent aussi : vu depuis le centre-ville, c’est sacrement impressionnant. … Mais vu depuis les fenêtres de son salon, c’est sacrement impressionnant aussi !!


Nous passons les heures qui suivent à la fenêtre à observer l’évolution de la situation. Impossible d'aller se coucher, on est loin d'avoir l'esprit tranquille. Des flots de fumée opaque sont emportées par le vent et recouvrent le centre-ville en contre-bas d'un voile épais. Avec la perspective écrasée, on a l'impression que les flammes lèchent les tours. A mesure que les heures passent, le feu se rapproche des pentes juste au-dessus de chez nous. Nous voilà désormais en plein dans le courant de fumée, l'air devient irrespirable dans l'appart, des flammèches volent devant nos fenêtres. Le stress monte, je crains que le palmier ou la haie dans le jardin ne prennent feu, et ma voiture est garée en bordure d'un terrain vague couvert d'herbes hautes et sèches.


Finalement, je décide de partir: entre passer la nuit à la fenêtre à surveiller l'évolution du feu et à m'inquiéter, ou parvenir à fermer l'heure quelques heures, le choix est vite fait, surtout que je travaille le lendemain. Me voilà donc à rassembler en vitesse dans un sac quelques affaires et tout ce que j'ai de précieux (''au cas où...''). Et je sors. L'air est épais, l'odeur du feu est partout, le vent hurle et me pousse, des gens sont postés juste à côté de ma voiture et régulent la circulation et les curieux. Je m'engouffre dans ma voiture, ai le temps de me rendre compte que le feu n'est vraiment plus très loin, à quelques 200m, et je quitte en trombe les lieux. La situation me semble complètement surréaliste.


Il est 2h du matin, me voilà à traverser toute la péninsule pour débarquer au milieu de la nuit chez un de mes collègues qui sauve ma nuit et ma tranquillité d'esprit en m'accueillant sur son canapé.


Lorsque je reviens le lendemain en fin de journée, cela fume encore. L'incendie a duré toute la nuit. Pas de dégâts graves heureusement: quatre maisons ont vu leur toit brûler, un moindre mal vu la taille de l'incendie et la force du vent. Une grande plaie noirâtre balafre désormais la montagne. Je pars faire un tour un peu plus haut pour me rendre compte de ce qui a brûlé : le feu a été contenu à 50m de distance des tours, et la piste qui traverse le flanc de la montagne a heureusement servi de barrière coupe-feu et l'a empêché de partir à l'assaut des hauteurs de Devil's Peak.


Entre le 1er novembre et le 12 janvier, les pompiers sont intervenus sur 5465 feux, soit une moyenne de 75 feux par jour ! 70% de ces feux étaient des feux de bush ou de montagne. Et le pire, c'est qu'une grosse partie de ces incendies sont criminels. Les enquêtes sont en cours...

Filmé depuis ma fenêtre


© 2023 par SUR LA ROUTE. Créé avec Wix.com

bottom of page