top of page

Leurs ancêtres étaient esclaves

Sur les CVs que je reçois, je vois souvent des candidats aux noms tels que John January, Margaret October, Regina December, Alfred May, Ruben November. Ils sont Coloured pour la plupart. Ce sont les descendants des esclaves du Cap.


Magnifiques portraits d'une expo vue récemment sur l'esclavage en Afrique du Sud

Au XVIIè siècle, lorsque les esclaves étaient débarqués des cales des bateaux au Cap, ils étaient vendus à l'administration pour la construction de la colonie et aux colons hollandais comme domestiques ou main-d'oeuvre dans les fermes et les vignobles. Leurs nouveaux maîtres s'empressaient de les déposséder de tout ce qui les liait à leur précédente vie et culture, y compris leurs noms.


C'est ainsi que beaucoup d'esclaves se voyaient donner des noms de jour de la semaine ou de mois de l'année. Ou bien on leur donnait un nom tiré de l'ancien testament (Adam, Moses, Abraham...) ou de la mythologie latine (Alexander, Hector, Kupido, Hannibal, Apollos...). Parfois le maître donnait son propre nom, en particulier quand il avait engrossé l'une de ses esclaves. Parfois le nom attribué à l'esclave était volontairement moqueur ou dégradant (Dikbeen (=jambe épaisse), Pasop (=se méfier), Fortuijn (=chanceux)...).


Beaucoup de ces noms sont devenus des noms de famille, qui se sont transmis jusqu'à aujourd'hui. Trois siècles plus tard, les descendants de ces esclaves sont les témoins de cette période de l'histoire.

Entre 1658 et 1808, on estime que 63 000 esclaves ont été importés au Cap. Au XVIIIè siècle, le nombre d'esclaves dans la colonie était bien supérieur au nombre de colons blancs. Ils venaient du bassin de l'Océan indien, puisque là était le territoire commercial de la Compagnie des Indes orientales hollandaise : Inde (principalement du Bengal ou de Malabar), Java, Sumatra, Ceylan, Mozambique, Madagascar, Malaisie, île Maurice...


La diversité des origines de ces esclaves a fortement contribué a enrichir la culture sud-africaine, ses traditions communautaires, sa cuisine composée de nombreux currys et relevée d'épices, la présence de l'islam et du catholicisme.

Certains esclaves parvenaient à racheter leur liberté au terme de longues années d'exploitation. Mais une fois affranchis, les anciens esclaves avaient bien du mal à sortir de la pauvreté. La terre était la propriété des colons uniquement. Étonnamment, ce sont les femmes esclaves qui avaient le plus de chance de s'en sortir et de s'intégrer dans la société libre. Aux premières décennies de la colonie, les femmes étaient une ''ressource'' rare. En conséquence, les femmes esclaves se retrouvaient dans le lit des hommes esclaves, mais aussi des colons blancs, des marins et des soldats de passage en escale (...D'où l'arc-en-ciel de couleurs de peau dans la société). Si une relation était découverte entre un homme esclave et une femme européenne, l'esclave était d'office condamné à mort. Alors que si une femme esclave avait une relation avec un Européen, cela était toléré par les autorités. Certains colons épousaient d'ailleurs leurs esclaves. Le statut des enfants issus de ces unions dépendait du statut de la mère : si la mère était esclave, l'enfant naissait esclave ; si la mère était libre, l'enfant naissant libre. Le statut du père ne comptait pas.


L'esclavage fut aboli lorsque l'Afrique du Sud passa sous la coupe de l'Empire britannique au XIXè siècle: la traite des esclaves fut interdite en 1808, mais ce n'est qu'en 1838 que les esclaves retrouvèrent un statut d'hommes et de femmes libres. Malgré tout, la domination des Blancs sur les Coloured et les Noirs continua dans les années qui suivirent, débouchant un siècle plus tard sur l'apartheid.


© 2023 par SUR LA ROUTE. Créé avec Wix.com

bottom of page